L’épicerie associative donne la priorité aux produits locaux et au lien social à Trémargat (22)
Thématique(s): Commerces - Soutenir les initiatives citoyennes
Infos pratiques
Adhérent depuis 2008
Maire : François Salliou
Adresse : Le Bourg, 22110 Trémargat
Téléphone : 02 96 36 55 07
Nbre d’habitants : 204
Superficie : 14 km²
Intercommunalité : Kreiz-Breizh
Contact BRUDED : Cécile Jamoneau
Autres expériences de Trémargat
Le projet citoyen d’épicerie a pu se concrétiser grâce au soutien financier et à l’accompagnement de la municipalité. Une collaboration naturelle dans cette « communauté » rurale, rendue possible par une culture de gouvernance locale partagée par les élus et les habitants.
Trémargat (210 habitants) est une commune rurale ‘‘hors normes’’ : malgré son isolement au cœur d’un territoire excentré, elle compte toute une palette d’entreprises ou professions atypiques : restaurant 100% bio, potier, ébéniste, fleuriste, infirmiers, coutelier… 16 exploitations agricoles – dont une majorité en bio et circuits courts- sont réparties sur 600 hectares de terre pauvre. Et aussi 16 associations, un café-cabaret-gites et une épicerie bio associatifs.
Pour Yvette Clément, maire de 2014 à 2020, le secret de cette vitalité est simple: « Depuis une vingtaine d’années, ce sont les citoyens qui décident directement des projets à mener, sur fond d’entraide et d’écologie militante. La municipalité est présente pour les accompagner et, au besoin, apporter un soutien administratif et financier ». La création de l’épicerie ‘‘Épices et tout’’ en 2012 est un parfait exemple de cette collaboration permanente entre élus et citoyens.
Une gouvernance locale partagée
La participation citoyenne est très forte à Trémargat. Avant chaque élection municipale, les grandes orientations du programme sont définies par les habitants, lors de réunions publiques. Une liste ouverte regroupe tous ceux qui souhaitent s’impliquer au sein du conseil et les électeurs tranchent.
Une fois l’élection passée, tous les citoyens peuvent participer à la conduite des projets aux sein des commissions consultatives. Particularité locale : les maires ne font qu’un seul mandat et la rotation des autres élus est importante. Ainsi, nombreux sont les habitants qui ont eu une expérience d’élu.
L’association « La Pépie » lance le projet
En 2009, l’association « La Pépie » qui gère le Trémargat Café, propriété communale, envisage d’ouvrir un« coin épicerie » dans le café afin de proposer des produits provenant de la commune ou des environs proches. L’idée séduit la municipalité et de nombreux habitants désireux de « consommer local ». Le cadre et les objectifs du projet sont fixés collectivement :
- Créer un service de proximité en gestion associative, centralisant des produits locaux et/ou bio sans concurrencer les épiceries des communes voisines proposant une offre classique.
- Favoriser l’économie locale, le lien social et l’accès à des prix raisonnables et à des produits respectueux de l’environnement.
L’ambition du projet grandit au fil des réunions et de l’enthousiasme qu’il suscite. Le « coin» prévu initialement est délaissé au profit d’un local dédié et spécifiquement aménagé. De l’avis de tous, le bâtiment accolé au café ferait parfaitement l’affaire … sauf qu’il est privé et que la municipalité n’était pas encore prête à l’acquérir.
Les habitants voulaient gérer une épicerie associative où acheter des produits bios et locaux. La municipalité les a aidés à concrétiser un projet créateur de dynamisme et lien social.
Yvette Clément, maire
La municipalité et des habitants s’impliquent
En effet, les élus ne souhaitaient pas investir dans ce bien estimé par les Domaines à 25 000 € sans garantie de subventions. La commune se tourne alors vers le tout nouveau Établissement Public Foncier de Bretagne qui accepte de faire le portage financier du bâtiment pendant cinq ans, finalement négocié à 20 000 €.
La municipalité demande aussi à la CCI de faire une enquête d’opportunité sur ce projet inédit dans le département. Alors que partout ailleurs, l’avis aurait été négatif elle a estimé « qu’une vie associative très poussée et une solidarité très marquée pouvait faire mentir une étude économique, trop froide et mathématique pour saisir tous les contours d’un projet : ici, l’adossement à un commerce existant (le café), la gestion associative, une forte attente et implication des habitants sont autant d’éléments qui peuvent être vus comme des gages de viabilité de l’épicerie ». Alors, pourquoi pas conclut-elle, certainement curieuse de voir la suite de cette aventure.
Effectivement, l’attente était vraiment très forte : d’après l’étude de faisabilité économique réalisée par un cabinet privé en 2010, « 87 % des habitants de la commune et de celles alentours étaient très intéressés par la vente directe de produits locaux dans une épicerie ». L’implication des habitants a aussi été à la hauteur tout au long de la phase d’élaboration du projet puis de celle des travaux de rénovation et d’aménagement, en grande partie réalisés en chantiers collectifs.
Le Pays Centre Ouest Bretagne (COB) s’est également impliqué pour faire reconnaître le caractère innovant du projet, point-clé pour l’obtention de financements extérieurs.
2 lieux, 2 associations
La synergie entre les deux activités semblait déjà être favorisée par la mitoyenneté des deux lieux. Elle sera renforcée par le choix de réaliser une ouverture pour les relier.
Toutefois, au regard de la spécificité des deux activités, il a semblé préférable aux porteurs du projet de créer une association dédiée la seule gestion de l’épicerie. Elle réunit rapidement une dizaine de membres actifs qui pourront compter sur l’implication ponctuelle de nombreux bénévoles.
Les horaires d’ouverture sont calés sur la disponibilité des bénévoles, souvent actifs, et des consommateurs : lundi et mercredi de 17h à 19h ; vendredi de 17h à 20h ; samedi de 10h30 à 12h30.
En 2024, les deux associations paient un loyer pour les locaux respectivement : 400€ pour le bar (qui embauche deux salariés) et 300€ pour l’épicerie (gestion purement bénévole). À cela s’ajoute les factures eau, électricité, chauffage à charge des associations également.
Sept ans après : bilan très positif pour l’épicerie …
Le succès a été au rendez-vous dès la première année et le chiffre d’affaires n’a cessé d’augmenter. Il devrait être de l’ordre de 120 000€ en 2019, soit le triple de celui prévu par l’étude de marché. La part des produits de producteurs locaux représente 50 % des ventes. Après avoir fait appel à des contrats aidés, l’association vient d’engager une salariée quatre heures par semaine pour soulager les bénévoles.
L’association est toujours aussi dynamique avec toujours une bonne dizaine de membres actifs.
… et pour la commune
Le projet aura coûté à la commune environ 125 000 € (acquisition, travaux, mobilier de départ) dont près de 60% financés par des partenaires publics (Union Européenne, Région, Conseil départemental, CC du Kreiz Breizh).
Pour les élus, « ce projet citoyen est une réussite économique et humaine qui apporte du dynamisme et renforce le lien social ».
rédaction : novembre 2019