Faire de la sobriété un avantage : la politique énergétique de La Méaugon (22)

Infos pratiques

Adhérent : depuis 2019
Maire : Jean-Marc Labbé
Adresse : La Méaugon, France
Téléphone : 02.96.94.83.98
Nbre d’habitants : 1286
Superficie : 6,78 km²
Intercommunalité : Saint-Brieuc Armor Agglomération
www.lameaugon.fr
Contact BRUDED : Cécile Jamoneau

Autres expériences de La Méaugon

Pourvue d’un barrage hydro-électrique depuis 1973, la commune de La Méaugon a rapidement placé le volet énergétique au cœur de ses préoccupations. Devenue une référence locale depuis la mise en fonctionnement en 2017 de son réseau de chaleur bois, elle poursuit aujourd’hui son engagement et place la sobriété au cœur de ses réflexions.

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Cette page-expérience a été rédigée à partir de la visite du 25 mars 2023 où plusieurs acteurs de l’énergie étaient présents ; d’où les compléments apportés par ceux-ci.

Une commune prédestinée

La Méaugon est une commune de 1350 habitants de l’agglomération briochine. Elle bénéficie du dynamisme de la ville de Saint-Brieuc toute proche tout en préservant son caractère de bourg rural. Son attractivité résidentielle mais son absence de commerces la pousse à questionner sa centralité.

En effet, la construction du barrage de Saint Barthélémy en 1973 – qui a noyé une partie de la vallée du Gouët ainsi que l’ancien Pont Noir en 1978 – l’a transformée en commune sans issue et sans commerces (tous les commerces ayant été noyés). Cependant, elle l’a également dotée d’une centrale hydroélectrique et d’une réserve d’eau potable de 7 millions de mètres cubes. Selon toute logique, son maire, Jean-Marc Labbé, est également le président de l’ALEC, vice-président du SDE22 (Syndicat Départemental d’Énergie) et vice-président à l’énergie de Saint-Brieuc Agglomération. Autant dire que le volet énergétique devient petit à petit un marqueur de l’identité de la commune.

De la rénovation thermique à la production d’énergie

Un audit énergétique

Dès 2008, Armelle Bothorel – la maire de l’époque – s’est interrogée sur les économies d’énergie possibles pour la commune. L’ALEC de Saint-Brieuc (encore appelée ALE) réalise alors un audit thermique des bâtiments communaux. Réalisé grâce à un outil de simulation thermique dynamique, il prend en compte les matériaux et l’inertie des bâtiments. Le constat est sans appel : ce sont des passoires thermiques… La priorité porte sur l’école : l’ALE préconise l’isolation par l’extérieur et celle des combles. Puis ce sera le tour de la mairie.

Des structures accompagnatrices

L’ALEC porte aujourd’hui le Conseil en Énergie Partagée (CEP) dont Kévin Fèvre est le responsable du pôle Collectivités, lui-même conseiller en énergie partagée de l’ALEC du Pays de Saint Brieuc. Le CEP consiste en une analyse plus globale des bâtiments de la commune : récupérer les factures, analyser et prioriser les interventions. LE CEP vient principalement en soutien aux communes de moins de 10 000 habitants.

Le SDE22, quant à lui, apporte une aide pour financer le service en complément des deux EPCI du territoire (Saint-Brieuc Armor Agglomération et Lamballe Terre & Mer).

La mise en place de la chaufferie bois

L’ALEC constate également la vétusté des chaufferies fioul et gaz des deux bâtiments thermiquement rénovés. La création d’un réseau de chaleur bois énergie a tout de suite été vu comme une piste possible, du fait de la proximité des bâtiments et des besoins de chaleur réguliers de la mairie et de l’école. La mise en œuvre du réseau de chaleur est décrite dans la fiche dédiée.

Il faut surtout retenir que ce sont les projets de chaudière et réseau de chaleur qui prennent du temps. En effet, il aura fallu plus 6 ans entre le lancement de l’étude et la mise en fonctionnement de la chaudière en 2017. Ce temps long est inhérent à ce type de projet difficile à monter techniquement et financièrement. Il démontre aussi la nécessité pour les élus d’avoir une forte volonté politique pour qu’il aboutisse.

La Gestion Technique des Bâtiments

Six ans après sa mise en fonctionnement, l’heure est au bilan et surtout à l’optimisation, notamment via la mise en œuvre d’une GTB (gestion technique des bâtiments) : l’ALEC a analysé les consommations énergétiques de la commune entre 2008 et 2019 et elle constate que « la commune est en avance par rapport aux objectifs fixés » selon Kevin Fèvre. À titre indicatif, elle a économisé dix-sept tonnes d’équivalents CO2 en 2019, alors que l’objectif est fixé à quatorze tonnes en 2050. De plus, la réalisation de 50 % des préconisations retenues par l’ALEC a déjà permis à la collectivité d’enregistrer une économie de 15 000 € sur son budget énergie. « Soit 11,50 € par habitant ».

 Il serait pertinent de mutualiser les temps de chauffe des bâtiments ; c’est-à-dire organiser les plannings d’utilisation des salles de façon à concentrer les usages sur des plages réduites ou à la suite. Culturellement, c’est compliqué car on est encore dans une logique de répondre favorablement aux demandes d’utilisation des salles sur des critères autres que celui-ci.

Dominique Ramard, président du SDE22

La ressource bois-énergie

Le choix du combustible se porte sur le bois déchiqueté, issu du bocage local. La commune fait appel à la SCIC Bocagénèse qui associe – sous son statut coopératif – les collectivités, les agriculteurs, les entreprises de travaux et les salariés de la SCIC pour une gestion durable de la ressource bois : le bois doit notamment être taillé entre le 15 novembre et le 15 mars pour respecter le volet environnemental en termes de biodiversité. Historiquement basée dans le Trégor, Bocagénèse regroupe aussi des producteurs de bois proches de La Méaugon pour relocaliser davantage la ressource.

Cela n’empêche pas la commune de vouloir développer une filière locale sur le parcellaire communal : elle est en veille pour imaginer l’achat de parcellaire et le reboisement des anciennes lagunes.

L’idée est d’acheter du bois sur pied afin de l’exploiter pour alimenter le réseau de chaleur, si l’on arrive à acheter un hectare, ce sera bien.

Jean-Marc Labbé, maire de La Méaugon

En outre, un partenariat opère avec Saint-Brieuc Armor Agglomération et le Conseil Départemental des Côtes d’Armor afin de récupérer du bois autour du lac (créé par le barrage). L’idée en filigrane est d’essayer d’acquérir des espaces boisés en vue de viser l’autonomie énergétique. De plus, la filière bois au sein de Saint-Brieuc Armor Agglomération est en réflexion et devrait voir le jour d’ici la fin du mandat, avec l’objectif de chauffer toutes les piscines de l’agglomération avec chaufferies bois.

Enfin, une expérimentation est en cours quant à l’usage du miscanthus, une herbe qui, lorsqu’elle sèche, a un important pouvoir énergétique.

Le miscanthus peut être exploité 3 ans après avoir été planté. L’objectif est d’intégrer 25 à 40 % de miscanthus dans le mélange de bois.

Jean-Marc Labbé

La mise en œuvre de centrales photovoltaïques

S’équiper de panneaux photovoltaïques : une prochaine étape pour La Méaugon ? Pour ce projet, la commune s’appuiera sur le SDE22 avec le soutien de Rachel Jaunas, coordinatrice de projets EnR au SDE22 et conseillère du réseau « Les Générateurs ». Cette dernière rappelle l’objectif : sortir des énergies fossiles et être autonomes en énergie. Pour cela, le SDE22 réalise généralement une première note d’opportunité. Les centrales peuvent être posées en toiture, sur des ombrières mais aussi au sol sur des sites dégradés (anciennes déchèteries, carrières…) sans oublier les nombreux délaissés routiers.

Ensuite, le SDE22 fournit les outils pour accompagner le projet, y compris sur la maintenance.

Ce sont ici aussi des projets longs à monter (à titre d’information, , il faut environ 4 ans pour faire émerger une d’une puissance allant au-delà d’un MégaWatt. Quant à l’opportunité de l’autoconsommation, certains critères sont rédhibitoires et il convient de bien se faire accompagner pour en vérifier la faisabilité et la pertinence.

Enfin, dans le cadre de projets privés, l’intérêt pour la commune – au-delà de favoriser le déploiement de productions d’EnR –  est de toucher des taxes, voire d’entrer au capital et d’avoir des dividendes.

La SPLET’Armor

Très récemment, la SPLET’Armor (Société Publique Locale Énergies et Territoires d’Armor) vient d’être créée par le SDE22, le Conseil Départemental, le Syndicat Départemental d’Adduction en Eau Potable (SDAEP) et les 8 EPCI costarmoricains. Elle va permettre d’accélérer la concrétisation des projets photovoltaïques des communes et des intercommunalités qui la rejoindront, en facilitant les démarches et en proposant un accompagnement allant des études techniques à la phase chantier, voire pour certains projets, l’exploitation et la maintenance.

La société publique locale va éviter aux collectivités de lancer les études et les appels d’offres sous leur propre entité, cela va leur faire gagner du temps.

Dominique Ramard

Gros plan sur l’éclairage public

L’éclairage public nuit à la biodiversité et représente le deuxième poste d’investissement d’une collectivité. La Méaugon a mené une politique autour de son l’éclairage public, moins tant pour soulager ses finances, que pour sauvegarder les insectes nocturnes. Une démarche qui lui a valu d’emblée les 3 étoiles du label “Village étoilé” obtenu en 2019 (label créé en 2019) et décrite sur la page dédiée.

2008 a été marqué par le zéro-phyto. C’est tout naturellement nous nous sommes intéressés à la réduction de l’éclairage. Très rapidement, nous avons procédé à l’extinction complète dès minuit, puis 22h. Aujourd’hui, tout est éteint à 21h. Et encore, seulement l’hiver, car il n’y a aucun éclairage nocturne du 15 avril au 31 août, ni le dimanche.

Jean-Marc Labbé

La réglementation en vigueur évolue d’ailleurs (arrêté du 27 décembre 2018) en réduisant petit à petit les périodes autorisées d’éclairage nocturne, imposant de nouvelles normes techniques et présente un volet de contrôle. Mais malgré l’évolution de la réglementation, il est possible d’aller plus loin. Les communes labellisées éclairent en moyenne 34% de moins que la moyenne nationale

Concrètement, à La Méaugon, cela se traduit par :

  • La réduction drastique de l’échelle de température de couleur, mesurée en degrés “Kelvin” , (indiquée avec la lettre “k”): la commune est passée de 2400k quand la loi impose un minimum de 2700k) : ce qui donne cette lumière jaune, moins impactante sur les insectes nocturnes que la lumière blanche habituelle.
  • La diminution du nombre de mâts : un écartement des mâts rendu possible par cette même lumière jaune qui ne donne pas cette impression de trou noir. On balise plus qu’on n’éclaire. Ainsi, sur le dernier lotissement de La Méaugon, seuls 4 mâts ont été installés (sur les 11 envisagés) : aux entrées du lotissement, au-dessus de la borne incendie et devant la Maison d’Assistantes Maternelles considérée comme équipement de service public.
  • L’usage du béton lavé (donc plus clair) sur le sol des trottoirs permet de refléter la lumière.

Lorsqu’on lui évoque l’inconfort au sortir d’une réunion pour rejoindre sa voiture dans le noir, Jean-Marc Labbé oppose la mise en place d’un minuteur qui éclaire le parking de la mairie plusieurs minutes, le temps de rejoindre son véhicule. Il est également possible de réactiver ponctuellement l’éclairage nocturne, à l’occasion d’une fête de village par exemple.

Le SDE22, quant à lui, est clairement positionné sur le sujet : l’éclairage représente 15 % de la consommation des communes.  Il préconise lui aussi d’aller vers la lampe jaune pour l’environnement et la biodiversité et va développer une charte de la pollution lumineuse. Dominique Ramard, son président, rappelle aussi l’importance d’avoir accès à un ciel étoilé d’un point de vue pédagogique.

La création de groupements d’achats

Autre projet de l’équipe municipale avec les communes voisines de St Julien et de Ploufragan, sous l’impulsion d’une élue qui a su mobiliser le reste de l’équipe. Avec la crise énergétique, apparaît l’idée d’initier des groupements d’achat sur la partie énergétique : bois buche, bois pellets, fuel, gaz jusqu’à des panneaux photovoltaïques en autoconsommation (avec réunion d’information proposée par l’ALEC) et des travaux d’ITE (isolation thermique par l’extérieur). Des réunions publiques sont organisées par les 3 communes et les groupements s’organisent.

Le même principe se décline sur l’achat collectif de VAE (Vélos à Assistance Électrique) : l’Agglomération briochine va prêter 8 vélos pendant 1 semaine gratuitement, les habitants se sont inscrits, et pourront aller voir ensemble un commerçant pour négocier les prix. Cela pourrait se décliner sur plein d’autres sujets : ramonage, vidange des fosses septiques. On a essayé de faire baisser de 10 à 15 % la facture des citoyens. A Saint Julien, ils travaillent à une mutuelle communale.

En savoir plus

Fiche sur le réseau de chaleur de La Méaugon

Fiche sur les village étoilés

Contact

Jean-Marc Labbé, maire de la Méaugon : lameaugon@wanadoo.fr 02 96 94 83 98

Rédigé en mai 2023

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