Le Sourn (56) : une boucle énergétique locale pour produire et consommer sa propre énergie

Commune voisine de Pontivy, Le Sourn bénéficie des atouts de la ville toute proche, tout en préservant son identité rurale. Sa population ayant doublé en 50 ans pour atteindre 2160 habitants, elle doit adapter ses infrastructures publiques. Son maire Jean-Jacques Videlo, sensibilisé à la notion de ‘pic pétrolier’, comprend que les énergies fossiles ne seront pas inépuisables. Il imagine dès lors une solution originale et autonome pour les besoins énergétiques de ses équipements.

Recherche de solutions

Après des actions pour réduire les consommations (isolation des bâtiments, changement des ouvertures, installation de chauffage central, réduction des éclairages), les besoins énergétiques résiduels sont quantifiés.

Nous voulions trouver des solutions locales et indépendantes : nous avons retenu le réseau de chaleur bois et les centrales photovoltaïques, avec autoconsommation puis revente du surplus.

Jean-Jacques Videlo, maire

Pertinence économique

Le coût du maintien des équipements actuels, comprenant fonctionnement et maintenance, associé à une hausse prévisionnelle du gaz à 2% (largement sous-estimée par rapport au contexte actuel) équivaut à peu près au coût de la création de la BEL. En outre, « la part de l’Etat dans le financement de fonctionnement diminue tandis que les aides à l’investissement sont toujours là : c’est plus intéressant d’investir ».

Équipements regroupés

Ce projet est facilité par la disposition des équipements : école, garderie, médiathèque, restaurant scolaire, mairie, espace bien-être/co-working. « Mon prédécesseur avait petit à petit regroupé ces équipements, à cette époque dans une logique de déplacements doux et de sécurité pour les agents communaux et les enfants. Il a concouru à la faisabilité du projet de BEL ». Pourtant, le projet ne bénéficie d’aucune aide de l’ADEME car la plupart des réseaux préexistent et ne sont pas jugés comme optimum (il faut contourner certains bâtiments au lieu d’aller au plus direct). D’une manière générale, « il est difficile de faire ce type de projets en milieu rural du fait qu’ils ne respectent pas les minimas de densité de l’ADEME : le linéaire coûte cher et diminue le rendement énergétique. Je le comprends mais cela freine le développement de ces projets ».

Triple boucle

L’innovation de la BEL : tous les équipements sont reliés par un triple réseau installé conjointement afin d’optimiser les travaux.

• Un premier réseau de chaleur bois alimenté par une chaudière de 100Kw (couplée par l’ancienne chaudière gaz du restaurant scolaire en secours et appoint).
• Un second réseau comprenant l’électricité produite par les 400m2 de panneaux photovoltaïques répartis sur cinq bâtiments et ombrières (puissance totale 81.4 kWc), et les apports électriques du réseau en complément.
• Enfin un réseau de fibre optique qui alimente les équipements publics en télécommunication.

Pour concevoir la BEL, la commune fait appel au BE Exoceth (Guer-56) et au cabinet d’ingénierie System Off Grid – devenu Sog Solar (85).

Gestion intelligente

Le réseau de fibre optique a une autre vocation que le simple usage numérique (téléphonie et internet) : la Gestion Thermique des Bâtiments. Elle permet de collecter les données, surveiller les consommations (fuites, surconsommation), piloter les équipements, travailler le déphasage entre production et besoins, anticiper les consommations, publier les données (transparence et pédagogie).

Ressource locale

L’approvisionnement en bois n’est pas pensé dès le départ du projet, la priorité allant à l’installation de la chaudière elle-même. Toutefois, « ma culture familiale forestière me pousse à mettre en lien les besoins énergétiques et la ressource bois » ; intention confirmée par la participation à la rencontre organisée par BRUDED sur le bois-énergie à Ploumilliau en 2021.
Le Sourn a la chance d‘être située sur le territoire d’intervention de la SCIC Argoat Bois Énergie et s’appuie sur son savoir-faire et son approvisionnement en bois local. Cependant, elle a la volonté de développer en parallèle sa propre filière ultra locale en repérant les gisements de bois communaux et intercommunaux (bords du Blavet, chemins d’exploitation, délaissés des zones d’activités) et les bois d’opportunité (chantiers publics, particuliers), en procédant via une prestation d’abattage par une ETA (entreprise de travaux agricoles).

Financement

Sur un investissement de plus de 700K€HT (300K€ chaudière + réseau chaleur, 106K€ centrales PV + réseau électrique, le reste en VRD et gros œuvre), la commune n’en a autofinancé que 20%. Considérée comme un ‘Smart Grid’ (système énergétique intelligent), la BEL est labellisée Cluster SMILE (SMart Ideas to Link Energies) et bénéficie ainsi de financements spécifiques en sus des financements habituels.
Le tableau de financement est disponible en téléchargeant la fiche.

A l’usage

L’équipement est encore récent puisque la chaudière bois est installée depuis avril 2022. Ce premier hiver fait donc office de test et nécessite des réglages. A terme, l’autonomie du projet passera aussi par la formation des agents pour le minimum d’entretien au quotidien, l’approvisionnement, la surveillance mais une entreprise spécialisée reste requise pour la maintenance.

Nous n’avons pas encore de recul sur les consommations mais il est escompté la production de 95% de nos besoins de chaleur et de 45% en électricité. Nous envisageons également de déconnecter le chauffage de l’eau par la chaudière en été, que l’on pourra éteindre, et de la raccorder au surplus électrique des panneaux solaires.

Une dernière étape consistera à réfléchir au stockage de l’énergie.

CONTACT :

Jean-Jacques Videlo, maire / 02 97 25 12 52 / mairie.lesourn@wanadoo.fr

Rédigé en janvier 2023