Saint-Lunaire (35) concilie gestion alternative des espaces verts et gain de temps agent
Thématique(s): Actions pour la biodiversité - Environnement et biodiversité - Zéro phyto & Espaces verts
Infos pratiques
Adhérent depuis 2008
Maire : Michel Penhouet
Adresse : 22800 Boulevard Flusson, Saint-Lunaire, France
Téléphone : 02 99 46 30 51
Nbre d’habitants : 2402
Superficie : 10,27 km²
www.saint-lunaire.fr
Contact BRUDED : Camille Ménec
Autres expériences de Saint-Lunaire
Optimiser le temps agent tout en favorisant la biodiversité, c’est le travail que mène la commune de Saint-Lunaire depuis de nombreuses années à travers de nombreuses actions : haies sèches, fauche précoce, favoriser le développement d’espèces “parapluie”, développer le concept de “ville gourmande”, actions sur le cimetière, et surtout beaucoup de communication et de pédagogie !
Objectif général : favoriser la biodiversité
La commune s’est fixée pour objectif de maintenir et créer une mosaïque d’ habitats pour la biodiversité (différents habitats qui attirent différentes espèces)
Observez ce que vous avez en faune, et accentuez ! Je demande aux agents d’observer l’environnement et d’essayer d’optimiser
explique Vincent Bouche, adjoint
Par exemple :
- 65% des invertébrés sont des espèces nocturnes, cela guide les décisions des élus sur la question de l’éclairage public
- Les orties attirent les papillons, elles ne sont donc pas systématiquement retirées. 30 espèces de papillons sont inféodés à l’ortie..
Le papillon est une espèce « parapluie » : préserver l’ortie qui l’accueille permet de préserver près de 150 autres espèces aussi !
Haies sèches pour diminuer le volume de déchets verts et favoriser la biodiversité
En 2017, l’entretien des espaces verts nécessitait 200 voyages en déchetterie à 6 kms (et 1h A/R de travail). Les agents font alors évoluer leurs pratiques et créent des haies sèches à proximité des chantiers de taille. Il s’agit d’entasser des branchages de bois mort, des rameaux à l’horizontale entre des piquets en bois jusqu’à un mètre de hauteur. Ces branches peuvent provenir de la taille de haies, de coupes forestières ou encore de tailles d’entretien d’arbres têtards, d’alignements, etc.
Cette technique a plusieurs atouts.
Les haies sèches peuvent servir de :
- zone de recyclage et de valorisation des bois morts, branchages et déchets de taille sur place, sans brûlage ni transport, ni broyage.
- protection contre l’érosion du sol par ruissellement de l’eau pluviale
- zone d’accueil, de protection et nidification pour les oiseaux, les invertébrés, les petits mammifères et les insectes qui échapperont là plus facilement à leurs prédateurs. L’abri qu’elles offrent les apparente à un hôtel à insectes, et elles servent aussi de refuge aux hérissons et amphibiens,
- zone de restauration de l’humus et de réservoir de matière organique par la décomposition du bois voire feuilles mortes.
- Cela peut aussi permettre de lutter contre des espèces invasives comme la renouée du Japon. Les haies sèches vont les priver de lumière en les associant a des arbustes
La première année, la haie descend de 20 à 30 cm, après, ça se calme. On recharge la seconde et au pied on met des plantes grimpantes (clématite des haies, chèvrefeuille, pois de senteur, capucine…). La haie sèche devient alors une haie vivante ! : dès qu’on a planté les piquets, les oiseaux sont venus dessus !
Vincent Bouche
Remplacer les haies de laurier ou de thuyas
Les haies de lauriers palme ont été retirées et remplacées par des haies d’espèces plus variées (troène, aubépines, haies bocagères…). On atteint ainsi plusieurs buts :
- Oiseaux : les petits passereaux nichent plus dans les arbustes que les arbres. On va retrouver plutôt des gros oiseaux comme les pigeons, corneilles, tourterelles (…) dans les arbres.
- Insectes : le sureau apporte des pucerons nécessaires pour les oiseaux. « si on veut des oiseaux en ville, il faut des insectes. De même, on laisse les orties pour les papillons »
- Ville nourricière : on plante des arbustes à baies (sureau, noisetier, arbousier …), on donne des recettes aux habitants pour faire de la gelée, on plante de l’argousier (donne des baies en hiver). « c’est beaucoup de pédagogie, de communication »
La commune a ainsi planté 1000 arbres et quelques 4000 arbustes.
On a (re)créé des corridors écologiques : haies bocagères, arbres fruitiers… on créé des îlots de végétation qui, connectés, permettent de relier les espaces
Diversifier et optimiser le travail des agents techniques
Les agents sont souvent recrutés via des formations d’éco jardinage comme le propose le CPSA de Combourg. « La charge de travail est très lourde d’avril à septembre, on cherche à l’équilibrer sur l’ensemble de l’année. »
- En janvier, les agents participent au comptage des oiseaux.
- Les agents ont mis en place un « plan d’accompagnement du vivant : un document rédigé par le service jardins & biodiversité et retravaillé avec une stagiaire et les élus : « on y a défini les habitats favorables à certaines espèces (haies sèches, prairies hautes, strates arbustives…). On a aussi beaucoup travaillé avec l’atlas de la biodiversité intercommunale »
- La Communauté de Commune a sollicité Noé Conservation pour les former aux sciences participatives (ex : observation d’1 m² de prairie, …),
- « Nous faisons du compost et on le met aux pieds des fruitiers, ça amende le sol. C’est réalisé en janvier, quand les agents ont moins de travail »
- Il n’y a plus d’arrosage sur la commune : cela représente un gain du temps d’agent et économise la ressource en eau.
« Nous favorisons la culture biodiversité des agents : il faut comprendre le cycle biologique, c’est indispensable et les agents sont là pour apprendre et pour transmettre (atelier greffage fait avec les enfants des écoles par les agents techniques). Nous disons aux gens : ne taillez plus vos haies après le 15 mars, et on fait pareil bien sûr ! »
A chaque période (janvier-juin), une espèce-parapluie est choisie. Actuellement, il s’agit du papillon autour duquel plusieurs animations vont découler. Les élus travaillent avec les services techniques qui ont fabriqué des papillons en bois en lien avec la médiathèque. Une page facebook y est dédiée.
Une ville gourmande
La commune a développé le principe de la « ville gourmande » : on plante des aromatiques (sauge…), des petits fruits (groseille, cassis, myrtille…) et des légumes (artichauts, rhubarbe..). Cela a plusieurs vertus : celle de proposer des choses à cueillir (gratuitement : cela touche les gens !) et attirer aussi les insectes pollinisateurs.
Nous n’avons pas constaté de dégradation ou de vols de plants.. . est-ce parce que l’on donne les fruits aux gens ? On travaille aussi l’esthétique des plants en permettant un fleurissement à l’année.
Renouée du Japon : une problématique
Il y a quelques années, le plan d’eau était envahi par la renouée du Japon, plante invasive qui aime la lumière. Un devis 25 000€ avait été établi pour tout arracher ! Il a donc été décidé de changer le mode d’intervention. Il a été choisi de ne plus rien toucher à partir du mois de mars où elle sort de terre. On laisse alors pousser les orties et les plantes sauvages (entre autres) pour qu’elles entrent en concurrence avec la renouée. En parallèle, on fait des chantiers d’arrachage manuel avec les habitants une à deux fois par an. On a laissé pousser les aulnes sur les berges (qui sont venus naturellement) tout en laissant des « fenêtres » pour dégager un peu la vue pour les promeneurs. Ces espèces créent de l’ombre et les renouées s’y développent beaucoup moins. Ces actions, menées depuis le mandat précédent, portent leur fruit : les renouées sont de moins en moins nombreuses.
La commune laisse le cimetière se revégétaliser tout seul
Auparavant, les sols, couverts de maerl (ces sables coquillers sont une richesse écologique des fonds marins : c’est un massacre écologique que de le prélever), étaient gérés d’abord avec des produits phytosanitaires arrêtés en 2006, (donc pollution des sols/eau), puis avec du vinaigre arrêté en 2015.
Outre les effets très négatifs sur les habitats, cela supposait aussi un temps de travail très important pour les agents. Aujourd’hui, les élus ont choisi de laisser pousser la végétation (fétuque) qui recouvre toute la surface : « On intervient désormais en tonte, à des moments clefs où les gens fréquentent le cimetière : fêtes des mères, pères, vacances été, Toussaint…. »
La première année, tout est négatif pour les habitants, mais une fois passé ce délai, les gens sont contents !
Les deux cimetières sont gérés de la même manière : les élus n’ont aujourd’hui plus aucune remarque, « on a même enlevé les panneaux explicatifs, ça ne sert plus à rien, les gens respectent les lieux et les manières de gérer ». La commune gère les allées principales et les particuliers les zones ‘inter-tombes’. Les pots en plastique (fleurs) sont recyclés ou réutilisés, le végétal est composté.
Fleurissement en pieds de murs
Les élus ont choisi de ne pas débitumer les pieds de murs : la commune avait refait toute la voirie et cela aurait été mal compris de défaire cela. « Nous avons juste laissé pousser et sélectionné les plants qui viennent naturellement dans les interstices, les murs… l’erigeron Karvinskianus, violettes, géranium, herbe à Robert »
Quand c’est ’joli’, les gens ne râlent pas !
Conclusions
- Ce qui importe est la pédagogie et l’écoute avant tout « ça ne sert à rien de parler de biodiversité si les gens ne comprennent pas, n’y voient pas l’intérêt, il faut donc expliquer, partager, communiquer, argumenter et écouter… »
- Il importe de créer ou recréer des habitats favorables à des espèces qui permettent à bien d’autres de se développer (dites « parapluie ») : les insectes sont la base pour attirer la faune (oiseaux, chauves-souris, micro mammifères…) et favoriser la pollinisation : la gestion de ces habitats doit être pensée en fonction des cycles naturels ;
- La gestion de la trame noire est dans les documents d’urbanisme : 65% des invertébrés sont nocturnes…
- Les agents ont un rôle prépondérant : ce sont eux qui font le travail et communiquent en permanence avec les habitants aussi ; « quand on les embauche, cela fait partie des points abordés et des exigences du poste »
Contact
Vincent Bouche, adjoint
rédaction : mai 2024